Neuf citations commentées pour une dissertation sur Gargantua

Voici un répertoire de neuf citations constitué pour aider les élèves de lycée qui préparent leur dissertation du bac de français sur Gargantua de Rabelais. Il a été particulièrement conçu pour aider les élèves de 1ʳᵉ Générale qui ont à lire cette œuvre selon le parcours associé  « Rire et savoir ».

Ces citations et les commentaires qui les accompagnent peuvent être directement utiles pour élaborer une dissertation. Mais faire une dissertation n'est pas si simple ! Il faut en connaitre la méthode : Pour cela, consultez mon Canevas de Dissertation : un outil pour visualiser simplement les étapes d'une bonne dissertation.


1. "Mieux vaut de rire que de larmes écrire, / Parce que rire est le propre de l’homme"

​Ces vers célèbres se trouvent dans l'« Avis au lecteur ». Ils disent l'importance du comique pour l'humaniste qu'est Rabelais. Sa conception du rire est si puissante qu'il la place dès le seuil de son roman et qu'il en fait un pouvoir proprement humain, c'est-à-dire une faculté dont seuls les Hommes sont capables. Ces vers nous laissent aussi entendre que le rire est salutaire ou thérapeutique : s'il "vaut mieux" que les larmes, c'est parce qu'il peut guérir des maux et des souffrances.


2. "Buveurs très illustres et vous, vérolés très précieux" 

​Cette adresse malicieuse aux lecteurs est un oxymore. Le livre est écrit à l'attention de personnes grossières et malades, mais ces derniers sont en réalités raffinés et brillants. Avant même le début du récit de la vie de Gargantua, le prologue attire donc l'attention sur le lecteur sur la profondeur du roman qu'il va lire. Même si l'on pourrait penser, de prime abord, que le propos du livre n'est pas sérieux, il faut en apercevoir la valeur philosophique et humaniste. Celle si se trouve justement dans le grotesque et dans l'inversion des valeurs indiquée par cette figure d'antithèse.   


3. "Il faut rompre l’os et sucer la substantifique moelle" 

​Il s'agit à nouveau d'un passage du prologue, mais ici, c'est à travers une métaphore qu'Alcofribas Nasier (le narrateur de Gargantua) livre au lecteur une clé de lecture du roman. La comparaison qui se trouve dans cette image de l'os à moelle invite le lecteur à ne pas s'arrêter à la grossièreté et à l'apparence pauvre du style de l'oeuvre. L'os est symbolique des thèmes vulgaires de Gargantua, mais il contient, à l'intérieur une substance précieuse ("la substantifique moelle") que le lecteur doit atteindre en décryptant les sens du roman.


4. Gargantua “sortit par l’oreille gauche” de sa mère puis cria “à boire, à boire, à boire”.

​La naissance de Gargantua, racontée dans le chapitre : « Comment Gargantua naquit de façon bien étrange » est fantaisiste et comique. Elle est caractéristique du carnavalesque de l'œuvre dans le roman, c'est-à-dire de l'inversion des valeurs auquel il invite. Il le fait ici à travers une inversion entre le haut et le bas du corps de Gargamelle. Ses premiers mots, qui constituent une répétition, sont aussi hautement symboliques : ils disent la nature excessive de Gargantua et annoncent les exagérations à venir. Mais cette soif est aussi métaphorique, c'est une curiosité pour le monde, une soif d'apprendre que manifeste déjà le jeune géant.  


5. "J’ai inventé un moyen de me torcher le cul, le plus seigneurial, le plus excellent, le plus efficace qu’on ait jamais vu [...] : Un oison bien duveteux".  

​Ce passage tiré du chapitre 13 ("Comment Gransgousier connut l'esprit merveilleux de Gargantua à l'invention d'un torchecul") illustre bien le comique scatologique, l'humour du bas corporel, que contient le roman. Il est aussi une parodie burlesque du récit d'exploit de jeunesse, par lequel commence beaucoup de récit de vies de héros. Un effet comique déconcertant nait de l'usage des trois adjectifs "seigneurial", "excellent" et "efficace" employé pour qualifier une méthode pour s'essuyer le postérieur. Ce chapitre recèle pourtant un sens plus sérieux : l'obsession du héros est de trouver un moyen de se débarrasser de ce qui est répugnant dans ce monde, du mal et de l'ignoble.    


6. "Thubal Holoferne lui apprit son alphabet si bien qu’il le disait par cœur à l’envers, et cela lui prit cinq ans et trois mois."

​Le personnage de Thubal Holoferne, qui prend en charge l'éducation de Gargantua dans le chapitre 14 ("Comment Gargantua fut instruit par un sophiste en lettres latines"), est le symbole de la mauvaise éducation scolastique. L'éducation des philosophes sophistes est absurde, superficielle et inutile. La satire de mauvais pédagogues est celle d'une érudition inutile. Ici une hyperbole met l'accent sur la perte de temps que constitue cet apprentissage ("cela lui prit cinq ans et trois mois"). Pour Rabelais, une éducation complète ne devrait pas être ennuyante et fastidieuse. 


7."Il les compissa si généreusement qu’il en noya 260 418, sans compter les femmes et les enfants".

​Ce passage scatologique a lieu à l'arrivée de Gargantua à Paris. Il est raconté dans le chapitre 17 : "Comment Gargantua paya sa bienvenue aux Parisiens, et comment il prit les grosses cloches de l'église Notre-Dame". Le comique du bas corporel se double d'un effet d'exagération, puisque le nombre de Parisiens noyés est démesuré. La noyade des habitants de la ville est aussi blasphématoire et constitue une parodie biblique puisque ce flôt d'urine s'apparente à un baptême. C'est depuis les tours de Notre-Dame que Gargantua se soulage. De plus, la ville reçoit son nom grâce à l'urine du géant : c'est "Par ris" (pour rire) que Gargantua décide de "payer à boire" aux citadins. 


8. L’éducation de Ponocrate est "douce, légère, délectable, si bien qu’elle ressemblait plus au passe-temps d’un roi qu’aux études d’un écolier".

​Ce passage est marqué par une comparaison (l'élève est explicitement comparé à un roi) et une gradation (les trois adjectifs qualifiant l'éducation de Gargantua sont de plus en plus intensifs et leur nombre de syllabe est croissant). Ces deux procédés soulignent l'importance du plaisir dans le bon enseignement menée par Ponocrate auprès de Gargantua dans le chapitre 24, "Comment Gargantua employait le temps quand il pleuvait". Ce principe contraste fortement avec l'enseignement catastrophique que les sophistes faisaient subir au protagoniste.


 9. "Dans leur règle, il n’y avait que cette clause : Fais ce que voudra, advienne que pourra".

​Les habitants de l’abbaye de Thélèmes n’ont qu’une règle à suivre : leur propre volonté. C'est ce que l'on découvre dans le chapitre 57 : "Comment étaient réglés les Thélémites à leur manière de vivre". Ce lieu merveilleux imaginé par Rabelais rassemble des personnes intruites, bonnes et vertueuses. Nul besoin d'instaurer un long règlement, comme dans les autres abbayes, pour garantir l'harmonie entre les thélémites. L'expression proverbiale, dont la force évocatrice repose sur l'effet de paronomase entre "voudra" et "pourra", repose sur un idéal humaniste selon lequel une société vertueuse garantit la liberté et le bonheur pour chacun.





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